Les nanos sont partout ! Pas seulement AUTOUR de nous mais A L’INTÉRIEUR de nous…Notre voyage dans le nanomonde se poursuit jusque dans l’intimité de notre corps.


Nous voici cette fois à Berlin... A l’Hôpital de la Charité, vénérable institution de la capitale allemande, qui est à la pointe des traitements de lutte contre le cancer, grâce aux nano bio-technologies. Ici, le professeur Andreas JORDAN développe des traitements révolutionnaires contre le cancer. Il en est aux derniers tests avant la mise sur le marché.


Dans cette seringue, une solution qui contient des nanoparticules, des cristaux de 7 nanomètres d’oxyde de fer recouvert d’un film de lipides pour le rendre biocompatible. Ces particules sont injectées directement dans la tumeur du patient, qui, une heure plus tard. Soumises à un champ magnétique ces particules vont s’échauffer et détruire la tumeur.

Les nanoparticules sont, dans le cas du Professeur JORDAN, utilisées pour traiter, mais elles peuvent également être utilisées simplement pour mieux « voir ».

Par exemple, pour trouver dans une cellule une molécule ou un gène porteur d’une pathologie, on envoie à son contact, un marqueur enrobé d’un nano composant capable de se fixer sur cette molécule. Si le composant reconnaît la molécule, il vient s’y fixer et relâche le marqueur qui devient visible et est immédiatement identifié lors d’analyse. Le diagnostic est fait !


C’est en suivant ce principe que, dans les années 1990,  les chercheurs réussissent à accomplir une tâche immense : décoder le génome humain. Pour automatiser une partie de ce travail, ils inventent les puces à ADN.

Sur une surface comme du verre, du silicium ou bien encore du plastique, ils ont fixé un ensemble de brins d'ADN modifiés qui permettent de visualiser les gènes dans une cellule. C’était la première étape vers un laboratoire à l’échelle d’une puce électronique : les « Labs on Chips ».  Aujourdh’ui, avec le passage à l’échelle nano, le  but ultime de ces laboratoires miniatures est d’être capable d’effectuer des diagnostics de pathologies, immédiatement, n’importe où, et avec une simple goutte de sang.

Les premiers Labs on Chips sont opérationnels mais leur utilisation est, pour l’instant réservée aux scientifiques. Mais une fois les problèmes résolus, les perspectives sont étonnantes. Pourquoi pas des puces capables d’identifier mais aussi de traiter directement une maladie ? Et pourquoi pas des puces in Vivo et non plus in Vitro ?

Mais tout cela reste de la science-fiction...

Revenons à la réalité. Dans le travail de Jordan, si la première étape est bien d’identifier les cellules cancéreuses, la deuxième étape est de les détruire sélectivement. C’est grâce à des nanoparticules qu’il réussit à trouver une solution à ce problème et concrétiser ainsi 15 ans de recherches.

Sur les 16 patients du programme de recherche les résultats sont éloquents : alors qu’on leur donnait trois mois à vivre, treize ont déjà gagné six mois de vie en plus. Pour les deux autres, le bonus est d’un an et demi. Le 16ème vient de fêter sa deuxième année de rémission. Mais les avantages de ce traitement sont aussi mesurables en terme économique. Le traitement coûte beaucoup moins cher que les thérapies habituelles. 

L’argent est plus que jamais le nerf de la guerre contre le cancer et pas seulement à Berlin… La compétition fait rage d’un continent à l’autre, d’un pays à l’autre mais aussi entre laboratoires...

Et il reste encore du chemin avant d’exploiter pleinement les promesses des nanoparticules : aujourd’hui, il faut encore injecter directement la solution contenant les nanoparticules dans la tumeur. Un long et minutieux travail préparatoire. Certaines tumeurs restent du coup encore inaccessibles, trop petites, trop grosses, trop enfouies... impossibles à atteindre.

Alors voici la prochaine étape à laquelle l’équipe de Jordan, et beaucoup d’autres chercheurs dans le monde, travaillent : fonctionnaliser les nanoparticules, c’est à dire faire en sorte qu’injectées dans le sang, elles soient capable de trouver seules leur chemin jusqu’à la tumeur et de s’y fixer.

C’est donc une révolution des modes d’administration des traitements que les nanobiotechnologies nous promettent. Les principes actifs seraient par exemple encapsulés dans des nanostructures, afin de n’êtres relâchés qu’à proximité de la cellule à traiter ou du virus à attaquer. Du coup au lieu de délivrer massivement dans le corps une molécule afin d’être sûr que dans le flot le problème identifié soit traité, on peut directement délivrer la dose précise sur le mal. Moins de médicament nécessaire, moins de gâchis, moins de contre-indication, mais aussi moins de m2 d’usine nécessaire pour produire la formule chimique.


Et puisque l’on travaille à l’échelle des briques de la vie, pourquoi ne pas envisager carrément la régénération d’organes ? Pourquoi ne pas réactiver ou stimuler la croissance des tissus perdus ? Les tritons ou les salamandres sont capables de le faire… pourquoi pas nous ?

Certains laboratoires travaillent sur la croissance des tissus comme la peau, mais d’autres vont encore plus loin et le plus spectaculaire est certainement ces souris aveugles, au nerf optique sectionné, à qui on a rendu la vue.

En fait les cellules nerveuses du cerveau se reconstituent d’elles-mêmes. Là où le nano intervient, c’est pour leur donner l’environnement nécessaire pour qu’elles puissent le faire, se mettre à migrer et reconstituer une liaison nerveuse sur l’échafaudage de nanofibres.

Si l’on sait exploiter certaines propriétés des nanomatériaux, d’autres sont totalement inattendues, telle cette solution qui contient des nanoparticules et qui stoppe les saignements en moins de 15 secondes ! Cette découverte faite totalement par hasard est promise à un bel avenir quand on sait que 50% du temps des opérations chirurgicales d’urgence est aujourd’hui consacré à tenter d’arrêter les hémorragies et non à soigner.

Toutes ces recherches débouchent peu à peu sur la marché.

Le cabinet Lux Research estime qu’à l’horizon 2014, le chiffre d’affaires des produits issus des nanotechnologies représentera 16% des produits liés à la santé. Dans les investissements américains axés sur les nano-sciences, la part destinée aux nano-bio-technologies a déjà atteint près de 55%, avec dès à présent des produits mis sur le marché.

On trouve déjà sur les rayons des pansements anti-bactériens. Le nouveau SmartShirt System de Sensatex mesure, lui, le rythme cardiaque, la respiration ou le mouvement grâce à des vêtements dotés de nanofibres conductrices. Plus anecdotiques, les tee-shirts ou les chaussettes anti-odeurs, le téléphone LG enduit d’une couche de nanoparticules d’argent pour se protéger des bactéries, ou encore le préservatif cryptomorphic aux nanoparticules d’argent mis au point par une entreprise chinoise. Alors, à quand les vêtements capables de soigner les blessures… ? ou les vilaines rides ?


Plus fou encore, certains rêvent d’un homme aux capacités physiques et mentales améliorées. Une créature entre Steve Austin et Terminator dont le squelette ou l’architecture musculaire seraient renforcés, avec des globules rouges capables de lui faire tenir des apnées de 24 heures. Un être dont les connections neuronales seraient dopées voire interfacées avec des nano-ordinateurs et des banques de données qui le doteraient de réflexes plus rapides, d’une connaissance encyclopédique, d’une capacité de mémorisation surdimensionnée. Un homme qui vaudrait des milliards…

Charles LIEBER travaille sur ce concept qu’on appelle l’interfaçage.  Dans son laboratoire au sein de la prestigieuse université de Harvard, à Boston, il nous montre un microprocesseur auquel il connecte des neurones. On peut voir sur les images de microscope des cellules connectées à des fils électriques de taille nanométrique.

Interfacer le vivant avec l’électronique, cela pose des problèmes d’éthique fondamentaux.


Comme toutes nouvelles découvertes, les nanotechnologies posent autant de questions qu’elles apportent de nouvelles solutions. Mais peut-on tout faire, tout oser ?

 

Des nanos en nous